Ikea, le Disneyland du couple

J’ai eu dernièrement l’occasion de passer du temps chez Ikea. Il se trouve que j’étais missionnée pour leur écrire des publi reportages une fois par mois. Pour les non-initiés, chez les journalopes, le publi reportage c’est de la pub déguisée en article.

Bouh la honte, elle bosse pour le symbole du capitalisme. Ce vendeur de meuble en kit, et dont la date de péremption est programmée. Ce symbole de l’ubérisation de la société, de l’unification des cultures et tout le blabla.

Ouais mais ils sont Suédois. Chais pas. J’arrive pas à leur en vouloir. Autant McDo, ouais, là, d’accord. Ou Total. Bah, bouh lala. Mais Ikea, ben non, les Suédois ils ne m’énervent pas en fait. Sont tranquillou dans leur coin. Personnellement, ils ne me font pas chier. Et depuis qu’on m’a offert un voyage en Suède pour mes 30 ans, j’ai un peu l’impression que c’est la famille, Ikea.

Bref.

Donc une fois par mois, je me trimbalais jusqu’à Portet-sur-Garonne. Sauf que, comme je n’ai pas de voiture, fallait que je demande à des potes. Et, en fait, mes copains, non contents de me prêter leur bagnole, ont décidé de m’accompagner. C’est devenu notre rituel du mois. Je partais avec mes deux gardes du corps, à la rencontre d’un nouveau produit qui devait m’inspirer. On s’achetait des hot-dog à 1 balle et on décidait qu’on avait finalement besoin d’un nouvel oreiller. Ou d’un couteau. Ou d’un économe. Parfois de bougies. Enfin, tu ne repars jamais les mains vides de chez Ikea. Ou alors, tu n’as pas d’âme et tu es un robot.

J’ai donc passé plus de temps à Ikea les six derniers mois que dans toute ma vie. Je suis désormais équipée en bougie, taie d’oreiller et chocolats Daim jusqu’à la fin de mon existence.

J’ai aussi trouvé que ce magasin pouvait être utilisé pour une analyse sociologique du couple. Parce qu’ Ikea, c’est un peu le Disneyland des jeunes couples qui s’installent.

J’évoquais dernièrement la charge mentale, et le fait que les nanas sont occupées à penser à tout, tout le temps, pour gérer le foyer. Pour ceux qui en douteraient, allez donc faire un tour chez Ikea.

Nota Bene : ceci est une analyse des couples hétérosexuels. Je ne vais pas commencer à m’éparpiller, y’a déjà assez de boulot avec ceux-là.

Donc, t’as généralement la nana, avec sa liste, qui fonce entre les rayons. Et puis le mec, quatre mètres derrière, qui traîne des pieds. Et qui, pour ne pas se sentir complètement inutile, a pris en charge la conduite du chariot. Il ne sait pas quoi faire de son corps, ni de son caddy, et crée donc des embouteillages entre les rayons.

Il se fait questionner sur la couleur des taies d’oreiller. On lui demande s’il préfère le bleu ou le gris. Il est au fond du gouffre, et regrette le temps où il dormait sans taie, à même le coton blanc, mais il sait qu’il doit paraître enjoué sous peine de créer un incident diplomatique. Il se force à sourire et lance un « comme tu veux, bébé. »

Si peu que belle-maman est de la party, et là, le mec est à bout.

– Non mais, Virginie ! Elle fout quoi ta mère dans les plantes, là ?

– Elle veut nous faire un cadeau pour la crémaillère…

– Non mais à m’en donné ! On n’est même pas à la moitié du magasin !

Et de fait, cet homme n’est pas au bout de ses peines. Il n’a pas encore traversé le hangar où est rangé le stock. Le moment qui précède les caisses. Ce moment particulier où si tu n’as rien pris, la panique t’envahit. Tu viens de te taper 1 h 30 de labyrinthe. T’as essayé de raccourcir le trajet au niveau des chambres à coucher, pour passer directement au rez-de-chaussée mais tu t’es planté. Tu es donc revenue sur tes pas, ce qui t’a fait finalement perdre du temps. Tu as slalomé entre les caddys errants, conduits par des hommes épuisés de ne s’occuper de rien. Tu as résisté à la tentation de prendre un paquet de chocolat Daim, alors qu’on t’en a proposé tous les trois mètres. Et tu ressortirais sans rien ?

Je vais quand même pas repartir les mains vides…. Tiens, tiens, elle est pas mal cette essoreuse à salade lumineuse.

Il ne te restait pourtant que quelques mètres à franchir. Et puis, tout s’écroule, tu te jettes sur le premier gadget à ta portée.

Tu fais la queue trois quarts d’heures derrière ce jeune couple qui a acheté une nouvelle chambre à coucher. T’as l’air un peu con avec ton essoreuse à salade lumineuse, quatre bougies senteur des îles, et un paquet de Daim. Tu te rends compte que si tu vois clair dans le jeu de ce jeune couple, ils font la même chose avec toi, et comprennent rapidement, en analysant ton caddy, que tu vis seule, avec tes bougies senteur des îles.

Puis tu regardes l’homme fatigué au volant du chariot.

Merci. Mais les Daim, c’est tout aussi bien.

 

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