Journal d’une confinée #jour30

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Pendant la confection des masques, Juju a pensé qu’il pouvait rapiécer son short et cacher un trou en cousant des « poches ». On dirait qu’un petit animal a pris possession de son cul.

Va bientôt falloir que je retourne à la Biocoop. J’avais en tête l’humiliation de la dernière fois, où je n’avais ni panier personnel, ni gel, ni masque pour cacher ma goutte au nez. Et comme on est jamais mieux servi que par soi-même, aujourd’hui j’ai dit, allez Lola, sauve le monde, sauve les graines de ton quartier, crée ton propre masque pour pouvoir te moucher en scred dedans.

J’ai donc dégainé ma machine à coudre qui prenait la poussière depuis que ma passion pour les fanions en tissu m’avait quittée (ou du moins jusqu’à ce qu’on me dise que ma guirlande ressemble à des strings. Le léopard n’a pas toujours fait l’unanimité. Surtout mélangé à la dentelle. Oui, bon, je comprends d’où vient l’idée de lingerie maintenant.)

Donc, j’ai mis de côté mon égo, et j’ai repris la machine en main. Toute la maisonnée a été mise à contribution pour cette activité de santé publique. Un vrai petit atelier de Chinois à Wuhan. Ça découpait dans un coin, ça cousait dans l’autre. Le fordisme pour les nuls, c’était nous.

Au bout de trois heures, on avait fabriqué deux masques et demi.

Le fordisme pour les gros blaireaux. Je l’ai toujours dit que je suis pas manuelle, ça va pas commencer parce qu’on est confiné. Les mauvaises langues diront que c’est la patience qui me manque. Mais je viens de passer trois heures à coudre deux masques, je sais pas comment on appelle ça si c’est pas de la patience.

Évidemment, on a voulu faire des masques stylés. Déjà que c’est pas funky, autant y mettre un peu de couleur. On a pris les patrons spéciaux pour les soignants. Ils sont donc un poil grand pour nous, avec un petite couture devant le nez, ça nous fait une tronche de chevalier, ou de gangster. Mais comme y a des fleurs et de la couleur, ça fait plutôt gangster qui va à la kermesse.

Je suis sûre qu’ils vont tous se la péter avec leurs masques en bambou recyclable à la Biocoop, ça me rend ouf. Moi, j’ai un demi casque en wax, on dirait que j’ai pas terminé d’enfiler mon t-shirt, c’est dégueulasse.

En plus, je t’ai foutu un chantier dans la baraque, tout ça pour deux masques, c’est déprimant. Y a du fil partout, des bouts de tissus échoués dans toutes les pièces et sur la totalité de mes fringues. On dirait que j’ai fait exploser une mercerie. Je comprends pas comment je me démerde. C’est la même chose que quand je cuisine. J’en fous dans tous les sens, un combat avec les aliments.

J’ai pas encore testé de sortir avec un masque. Mais rien que pour prendre la photo, il m’a saoulée le truc. Du coup, je tente d’écrire mon billet avec. J’ai l’impression d’être un hacker de la team Anonymous, et de coder un truc qui va mettre en péril la situation économique mondiale. Juju lui, n’a pas l’air d’avoir compris le concept du truc. Il vient de me demander comment on fait pour boire.

Elle est pas gagnée cette guerre, je vous le dis.

C’est cette histoire de déclaration de Manu qui a foutu le stress a tout le monde aussi. Putain, et ce masque, il me gratte sa mère. J’espère qu’il va pas faire son radin et nous balancer une info. Bordel, je galère, le machin remonte j’y vois plus rien. Putain de masque, chuis tellement pas prête pour la Biocoop demain.

Juju vient de me demander de faire un trou dans le masque pour fumer. Avec une petite fermeture éclair.

Wallah, si y a la guerre, je change d’équipe.

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