
Vu qu’on a cinq semaines à se regarder dans le blanc de l’œil (oui bonjour, je travaille dans un lycée, soyez pas rageux les gens en télétravail), je pense que le mieux que j’ai à faire, c’est de vous raconter tous les trucs hyper excitants que je vais faire.
Cinq semaines pour se recentrer. Être créatif. Se regarder. Oui, se regarder. Putain, ça vous fait ça ou c’est moi qui suis complètement mégalo ?
Là, je suis sur mes cheveux.
Je m’observe la touffe, et elle m’énerve. Quand je reste trop longtemps chez moi, ça me démange, j’ai envie de me couper les tifs.
Mais je me retiens. Et puis arrive le lundi et j’ai autre chose à foutre que me mater la mèche.
Sauf que là, cinq semaines, ça va être chaud. À tous les coups, je vais terminer le confinement avec une frange. Si dans cinq semaines, vous me voyez arriver avec un chapeau, c’est que le confinage a mal tourné.
En même temps, si je coupe maintenant, dans cinq semaines, ça aura repoussé de 1.2 milimetres.
Chuis dans la merde.
En plus, ils ont fermé les bars. Je le crois pas. Sans prévenir. Sans sommation. Sans même mettre en place un suivi psychologique.
On était tranquille à l’apéro hier soir à la maison, quand la nouvelle est tombée. Les bars ferment à minuit. Pour ne plus jamais rouvrir. Genre minimum 15 jours.
Mouvement de panique générale. On engloutie nos pâtes au pesto rosso et on se jette dehors. J’ai même pas pris le temps de me refaire une beauté, le temps était compté.
– Kess tu fous Viviane ! Putain mais accélère on a plus que deux heures de bar !
– Mais j’ai oublié mon chargeur en haut ! Donne moi tes clés je vais le chercher !
– Mais putain tu nous fais perdre des SHOOTERS BORDEL !
On s’est mis une caisse express, en mode fin du monde. Comme ça, quand ils nous ont mis dehors à minuit, on avait l’impression qu’il était 4h du mat.
Ça nous a pas empêché de continuer la soirée à l’appart en suivant. Je suis jamais chaude pour qu’on aille chez moi parce que ça implique que tu doives te taper le ménage avec la gueule de bois. L’enfer. Mais là, j’étais prête à me dévouer pour l’Histoire.
Un quart d’heure plus tard, j’avais les keufs à la maison. Ils m’ont promis une amende de 68 euros s’ils devaient se redéplacer. J’ai trouvé ça pas cher.
Du coup, j’ai dit 168 euros aux potes. Sinon ils auraient jamais voulu bouger et j’avais pas envie de commencer mon confinement en m’embrouillant avec les voisins. On sait jamais, que je manque de PQ.
Dans la panique de la journée, j’avais acheté du pinard chez le caviste. J’étais plutôt inquiète de devoir me taper cinq semaines à la tisane.
On a tout bu.
J’espère que le caviste est encore ouvert.